Balado De temps et d’argent

Épisode 4 : Le couple, l'entrepreneuriat et une pandémie mondiale

Une océanographe engagée et un réalisateur passionné tombent amoureux et lancent un OSBL voué à la sauvegarde des océans. L’animateur Stéphane Fallu apprend aux côtés de Jean-Sébastien et d’Anne-Marie ce qui arrive quand on concilie travail, couple, passion commune et projets mis en pause par la COVID-19.

Stéphane Fallu (S -)

Bonjour tout le monde ! Bienvenue à De temps et d'argent. Ça, c'est un balado, en collaboration avec la Sun life, où nous parlons avec des gens d'ici de l'influence de l'argent sur leur quotidien, leur santé, leur bien-être. Je m'appelle Stéphane Fallu.

Oui, oui c'est moi ! Je ne donne pas de conseils financiers, ce n'est pas mon travail.

Non, non, non ! On va parler avec des gens avec des histoires hyperintéressantes.

Et je reçois aujourd'hui deux personnes Jean-Sébastien et Anne-Marie.

Jean-Sébastien et Anne-Marie, en direct de leur voiture. Bonjour !

Anne-Marie (A -)

Salut !

Jean-Sébastien (J -)

Hello !

S - Salut ! Bon la première question, pourquoi dans une voiture ?

A - On est en camping en ce moment sur la Côte-Nord, donc on s'est dit quoi de mieux que de faire un peu de télétravail sur le bord du fleuve en regardant les baleines.

S - Premièrement, tu parles des baleines, déjà tu m'ouvres une porte, toi c'est ton travail ?

A - Et bien je suis biologiste marine de formation et j'ai aussi une maîtrise en environnement, plus précisément en gestion de la biodiversité marine.

S – Ok.

A - Et puis je travaille surtout en conservation de la faune marine, puis on a fondé notre propre entreprise, donc ce qui m'a amené à développer un petit peu plus mon métier et mon savoir.

S - Et toi, Jean-Sébastien, tu es dans un autre domaine complètement ?

J - Ouais c'est ça, ben en fait c'est ce qui nous a permis surement de mixer nos deux passions pour créer notre entreprise. Moi je viens du milieu de la postproduction, on s'est rencontré sur un projet documentaire. Moi j'étais dans une salle sombre de Radio-Canada et je montais des capsules web sur un projet de bateau… d'expédition en bateau en fait… et puis Anne-Marie était sur le navire comme chef plongeuse. Bref, on s'est rencontré par la suite.

A - En vrai !

J - En vrai.

S - Ok.

J - C'est des rencontres tout à fait anodines dans des bars puis c'est seulement 4 ans après quand on s'est revus...

A - On s'est liké sur Tinder !

S - Oh les deux là ! On va dans la vraie vie, j'aime ça. Alors on peut observer les baleines et également être sur Tinder, c'est un bon mix.

A - C'est ça, exact.

S - Ce qui est drôle, c'est que par exemple Anne-Marie on dirait que Jean-Sébastien te connaissait, s'il a fait des montages avec des trucs sur toi, enfin qu'il a pu t'observer sur plusieurs angles !

A - Tout à fait oui, ma plus belle nature en wetsuit les cheveux mouillés avec un masque d’étampé dans le visage...

S - Ok, vous vous rencontrez quelques années plus tard ... Toi tu habites où, Jean-Sébastien, tu es à Montréal dans ce temps-là ?

J - Ouais c'est ça, dans ce temps-là je suis à Montréal puis Anne-Marie est citoyenne du monde. Ouais, c'est ça j'ai réussi à la retenir un peu en ville puis c'est justement en parlant de nos projets… puis moi j'ai eu… en travaillant sur un projet documentaire sur la biodiversité, j'ai eu la piqure évidemment. Pour en venir à l'organisation bleue, en fait c'est Anne-Marie qui avait un désir de raconter ses aventures, et moi j'avais le coffre à outils pour ouvrir, l'aider à raconter ces histoires-là, donc c'était comme un match, un match...

A - C'était vraiment un bon match dans la vie et c'était vraiment un mon match entrepreneurial.

S - L'organisation bleue c'est quoi en gros ?

A - En gros l'organisation bleue c'est un organisme qui fait de la sensibilisation environnementale par le biais de la vulgarisation scientifique et du média créatif.

S - Ok.

A - Donc on éclate un peu les concepts de blogues, d'éditoriaux, de vidéos puis on crée une plateforme web finalement, un genre de hub, et des réseaux sociaux où on publie du contenu de toute sorte, ce qui fait que l'on a plein de projets un petit peu funky.

S - Puis toi ton travail là-dedans c'est de tout regrouper ça pour faire les vidéos, toutes les plates-formes ?

J - Ben c'est ça, les outils techniques autant comment construire un site web, comment utiliser un software de montage pour raconter une histoire, publier ça en ligne, c'est tout le temps dans le but de toucher les gens le plus possible, puis de faire de la vulgarisation scientifique, mais accessible, en nuances.

S - C'est quoi les principaux défis dans votre cas-là ?

A - C'est bien beau d'avoir un site web et des projets, mais faut qu'ils soient vus et entendus.

S - Ouais.

A - Ça fait que ça, c'est un premier défi, on a bâti notre communauté depuis 2 ans from scratch, on est vraiment partis de zéro. On n'a pas investi beaucoup d'argent dans le marketing pour aller chercher des gens, c'est vraiment les gens qui viennent à nous ce qui fait qu'on les voit de façon très organique, mais c’est vraiment beaucoup de défis en soi de faire ça.

S - Oui.

J - Un de nos objectifs était vraiment de bâtir une communauté puis une entreprise qui est fondée sur la notoriété.

A - Oui.

J - Parce que les enjeux environnementaux sont très importants et je pense que pour avoir une pertinence il faut faire ses preuves, et ça ne se fait pas du jour au lendemain.

S - Oui ce n'est pas en le disant que l'on convainc les gens, c'est en l'illustrant puis en le montrant, en montrant ce que vous avez comme bagages.

A - Exactement.

J – Oui, c'est ça puis je pense qu'il faut que ça vienne du cœur, il faut que ça soit quelque chose qui se bâtit parce que c'est fait par amour. On parlait justement d'amour tantôt, c'est ce qui nous a unis, mais je pense que c'est ce qui fait qu'au quotidien on est capable de continuer de faire nos projets, sans avoir de financement encore majeur ou tu sais sans... Mais c'est que c'est ancré dans nos valeurs de faire ce projet-là donc ...

A - C'est un projet de cœur définitivement.

S - Pour vous c'est quoi les prochaines étapes ?

A - Tu sais, on a des enjeux de croissance, on se retrouve avec des horaires ultra, ultra chargés parce qu’on a de la misère à dire non aux projets. Tu sais, c'est vraiment, on est dans une fourchette entrepreneuriale où c'est quasiment... il faut réinvestir dans notre premier investissement pour être capable de grossir davantage. 2 têtes ce n'est plus assez, on aurait besoin de 3-4 têtes. Ce qui fait que ce sont vraiment de beaux enjeux positifs pour nous puis, on est de plus en plus vus, plus entendus, les gens ont comme soif d'en savoir plus sur l'Organisation bleue. Enfin pour nous c'est ça, c'est beaucoup, beaucoup de positif, mais des enjeux surtout de croissance puis d'agrandissement des ressources humaines et financières.

S - Et quand on parle d'agrandir les ressources humaines, tu sais ça reste une entreprise de cœur, mais c'est ... il faut être bien organisé de façon financière également ?

A - Tout à fait, quand on a fait l'école des entrepreneurs, on a eu un mentor pendant quasiment 6 mois et on se retrouvait souvent un peu dépourvu justement devant notre coffre à outils justement parce qu'on avait beaucoup de mentorat pour une INC. pour faire du profit.

S - Ouais.

A - Puis nous on est là, à essayer de monter un modèle d'affaire à but non lucratif, toutes les bases sont les mêmes que pour une entreprise privée, c'est juste que nous les profits on les réinjecte dans la production de contenu, on les réinjecte au sein de notre propre entreprise. Ce qui fait que les enjeux étaient quand même assez grands, ne serait-ce que pour structurer toute la base, puis après, on te demande de faire des plans d'affaires: « Visionne comment tu vas gagner ta vie dans 5 ans ». Finalement ...

S - Ouais, mais c'est de vieux modèles peut-être parfois, c'est pour ça qu'il faut aller chercher de l'aide avec des gens qui peuvent nous aider, dans votre projet par exemple.

A - On n'avait même pas de plateforme web de lancée, puis réellement on était tout excité, tu sais, il y avait plein de monde qui comprenait déjà ce que l'on faisait.

Ça, c'était des bons signes qu’on a réellement quelque chose entre les mains.

S - On parle beaucoup d'environnement, je veux dire dans les médias et là il arrive quelque chose qui s'appelle la COVID, l'environnement on s'entend que ça a pris un peu, on a moins discuté, tous les choix que l'on fait sont vraiment différents. Comment c'était pour vous autres ?

A - Au niveau de l'entrepreneuriat, ça a été doublement difficile parce que l'on a perdu beaucoup d'opportunités. Tu sais si on y va, en face il y a eu comme le moment où ça a pété là dans le fond. Ça a été comme beaucoup de stress, je pense, individuellement évidemment parce qu'on s'adapte, tout change tout à coup.

S - Ok.

J - On a des opportunités évidemment qui n'ont pas pu avoir lieu, mais on en a gagné d'autres par contre.

S - Ok.

J - Donc là, c'est un revirement de bord… en ayant ... tu sais on avait des projets de créer une semaine d'événements-là à l'été, mais ça, ça impliquait de regrouper des centaines de personnes.

A - On lançait un festival !

S - Tu sais, le timing is everything.

J – Mettons ! On a fait notre semaine de sensibilisation en ligne, donc ça nous a permis d'avoir d'autres partenaires, de rencontrer d'autres gens.

A - On a été vu, on a été entendu pendant la semaine des océans parce que justement tout le monde était connecté sur son ordinateur, ce qui fait qu'on a tourné ça en opportunité et puis ça a payé.

S - Ok, ça a payé parce que l'environnement c'est quand même un débat qu'il ne faut pas oublier.

A - Non, tout à fait.

S - Ça fait que votre projet est de plus en plus pertinent pour les années à venir.

A - Ça a toujours été extrêmement important, et là cette année en début d'année, sont arrivées les grèves climatiques des étudiants avec tout le mouvement de Greta Thunberg.

S - Oui.

A - Là on se disait : « Oh my god ! », c'était là que ça allait se passer pour nous. Puis la est arrivé la COVID, mais comme tu dis, on dirait que depuis que la COVID c'est encore plus important que jamais parce qu'on est confiné chez nous, donc on s'en rend un petit peu plus compte - j'ose espérer - de toute la qualité qu'on peut retrouver au Québec, mais aussi de toutes les ressources à protéger, à chérir, les gens ...

S - Faut faire attention.

J – Exactement, puis les gens découvrent l'environnement ici-là, je veux dire la Gaspésie c'était le hype-là cet été et ça a pu rapproché les Québécois de leur environnement.

S - Oui.

J - Au départ notre objectif c'était surtout de présenter et parler des plus grands enjeux de la planète, donc des fois ça t'amène à explorer des sujets qui sont outre-mer, qui sont en Amazonie, qui sont ...

S - Oui.

J - Puis là, la COVID nous a dit un peu : « Rentrez chez vous, faites vos affaires, prenez soin de votre petit lopin de terre », puis on s'est un peu adapté dans ce sens-là, aussi pour exploiter des sujets plus dans notre environnement proche. Puis justement, ce sont des enjeux qui se vivent partout sur la planète de la même façon. Il y a des endroits pires que d'autres, mais on s'est dit justement qu'on ne pouvait pas se permettre de juste communiquer en français localement…

A - Ouais on est suivi un peu partout finalement ça fait que même si on est en train de se recentrer plus au Québec, on touche quand même à des enjeux plus globaux ou plus larges. Mais c'est aussi tu sais, quand bien même on parlerait de pollution plastique au Québec, c'est le même enjeu en Australie, en France, en Amérique du Sud… ce qui fait que les enjeux restent les mêmes sensiblement partout. Mais quand bien même on le communique en Québécois, le message passe quand même.

S - Ouais, un couple qui travaille ensemble, je change un peu de sujet, c’est quoi le défi ? Parce que le travail, quand tu dis que tes bureaux sont à la maison, est-ce qu'on est capable de faire une petite pause entre les deux ?

A - Et bien l'entrepreneuriat déjà, ça s'apprend, puis la vie amoureuse ça s'apprend aussi… Ce qui fait que là, c'était deux beaux défis en parallèle qui deviennent souvent un bon gros blob ! Je dirais que deux ans plus tard on apprend et on applique de plus en plus la séparation des deux volets qui sont l'entrepreneuriat et la vie normale. Enfin, je ne te cacherais pas que pendant quelques mois, voire presque une année, il n'y avait pas de séparation entre les deux, malgré que l'on essaie de l'appliquer de plus en plus…

Ce qui fait qu'on éteint les ordinateurs à maximum six heures le soir, quand on est capable.

J - Ouais.

A - On essaie de prendre des après-midis off ci et là, et puis des weekends… on est en camping en ce moment !

J - Les deux on se vide aussi, et on est deux personnalités différentes, on vit des stress différents, probablement différents donc si moi il y a des moments où j'ai besoin de décrocher, peut-être pas Anne-Marie, puis ça c'est correct aussi puis vice-versa.

Puis comme on est tout le temps ensemble, on a tout le temps des projets en tête et on veut tout le temps s'en parler. C'est vrai que ça, c'est vraiment à nous de ...

A - Ouais.

J - Justement de se mettre des limites, puis encore là je pense que la clef c'est vraiment la communication.

A - Oui, ça garde le pep.

S - Ça garde le pep, mais c'est quand même aussi important parce que s'impliquer dans une entreprise comme la vôtre... Tu sais, on veut des résultats.

A - Je ne pense pas qu'un entrepreneur se lance en affaire pour que son projet implose au bout d'un an, tu sais.

S - Qu'est-ce qu'on vous souhaite à vous deux ? Avec votre projet un peu fou.

A - Et bien on souhaite pas nécessairement plus de projets… parce que ça n'arrête pas ! Mais on ne souhaite pas que ça ralentisse trop non plus. Donc je dirais plus d'appuis, plus de soutien financier, puis une plus grande reconnaissance de ce qu’on fait… puis de l'importance de pourquoi on le fait aussi.

S - Est-ce que tu t'ennuies, Anne-Marie, d'être sur les bateaux ? D'aller faire de la plongée, d'aller voir les baleines, parce que c'est un autre domaine, ou tu es bien dans ce que tu vis là ?

A - Et bien je suis bien dans ce que je vis en ce moment, mais c'est sûr que, c'est une bonne expression anglophone, j'ai les itchy feet là, j'ai les pieds qui piquent, je m'ennuie beaucoup de cette liberté-là, de partir un peu au gré du vent. « Stack ton sac ! Go ! » J'ai un stage ici, j'ai une opportunité là-bas… Mais, je suis contente d'être au Québec, tu sais ça fait déjà deux ans que je suis ici là, vraiment plus ancrée, je n'ai pas pris l'avion depuis deux ans.

S - Ok.

A - Malgré que l'on se soit beaucoup promené Jean-Séb et moi dans le pays-là, mais oui ça me manque. Bateaux, baleines et plongées très bientôt.

S - Très bientôt, puis toi est-ce que tu t'ennuies des sous-sols de Radio-Canada Jean-Sébastien ? À faire du montage, à t'occuper de tout ça.

J - C'est drôle parce que je continue toujours mon travail en postproduction, je fais du montage, je suis devant mon écran quasiment 20 heures par jour. Mais ça a été des belles années, beaucoup d'apprentissages que j'ai faits là-bas avec des collègues super.

S - Tantôt on parlait de plein d'affaires qui étaient... C'est souvent sur 5 ans, puis que c'est dur parfois de savoir dans 5 ans, mais vous, vous voyez où dans 20 ans ?

J - Dans 20 ans moi, je me verrais avec 5-6 à 10 employés.

A - Je pensais que tu allais dire enfants !

J – Non, mais tu sais, des employés - pas pour dire que j'aimerais être un boss - mais plutôt pour sentir qu'on a réussi à bâtir un modèle qui est là, qui est fait pour durer et qu'on est capable d'engager des gens, qu'on est capable de faire passer notre message puis que, je ne sais pas, que l'Organisation bleue soit un peu ancrée dans notre quotidien ...

A - Dans le paysage.

J - Dans le paysage oui c'est ça, puis que, qu'on sente que c'est là pour rester.

S - Puis toi, Anne-Marie ?

A - J'achète un bateau déjà.

S - Oui.

A - Pour pouvoir vivre dessus et pouvoir avoir des segments-écoles sur le voilier pour vraiment ouvrir un peu un laboratoire flottant pour les jeunes. Pour expérimenter vraiment c'est quoi la vie de matelot puis c'est quoi la science qui se trouve sous l'eau, que ce soit le fleuve ou ailleurs. Puis je nous souhaiterais de mieux pallier travail et famille parce que dans 20 ans on va peut-être être plus que deux… Donc, déjà mieux gérer tout ça !

S - J'aime ça, c'est la première fois depuis le début de l'entrevue que vous êtes un peu déstabilisé. Tout le reste c'était : « on sait ce qu'on veut, on veut ça, ça, ça » ...

A - C'est sûr !

S - C'est certain que ce n'est pas évident du tout. Et bien moi ce que je vous souhaite, ce que je peux vous souhaiter c'est que l’Organisation bleue cela devienne une marque, une façon de vivre, je souhaite que les gens changent leur comportement parce que le travail c'est en amont et vous le faites bien. Je vous souhaite de belles vacances, en camping présentement. C'était vraiment un plaisir de vous rencontrer les deux, deux personnes différentes, mais qui ont un but, une passion commune…

A – Merci !

J - Merci beaucoup.

S - Ça me fait plaisir, faites attention à vous et puis on se revoit prochainement, quand vous allez avoir votre festival, je veux être là !

J - Yes, all right.

S - Bonsoir merci beaucoup !

(Musique)

Merci tout le monde ! Merci d'avoir écouté !

L'argent, on peut réaliser que ça joue un rôle énorme dans nos vies. Mais c'est pas toujours facile d'en parler. Je pense que c'est important d'en discuter de manière ouverte et franche parce que ça peut améliorer notre santé mentale, physique ou financière.

Si vous avez des questions, ben, vous pouvez trouver des ressources pour vous aider à Sunlife.ca

Merci d'avoir écouté cet épisode du Balado De temps et d'argent ! Mon nom est Stéphane Fallu. Ce fut un plaisir !