Qu'est-ce que l'impôt en main remboursable au titre de dividendes (IMRTD)

Qu'est-ce que l'impôt en main remboursable au titre de dividendes (IMRTD)

De nombreuses sociétés canadiennes exploitant une petite entreprise peuvent toucher deux types de revenus :

  • Revenu d'une entreprise exploitée activement - potentiellement admissible au taux d'imposition moins élevé des petites entreprises
  • Revenu de placement sous forme d'intérêt, de dividendes et de gains en capital - imposé à un taux plus élevé

L'impôt en main remboursable au titre de dividendes (IMRTD) est une notion fiscale importante qui s'applique au revenu de placement que touche une société. On en parle dans beaucoup de nos formules en assurance-vie, notamment dans la Stratégie de retraite pour entreprises et la stratégie Placement protégé pour compagnies. Dans cet article, on aborde les points suivants : ce qu'est l'IMRTD, son rôle dans notre système fiscal et son calcul.

En quoi consiste l'IMRTD?

Vous trouverez ci-dessous une discussion générale portant sur l'IMRTD; il s'agit d'un compte théorique qui est créé lorsqu'une société privée ou assujettie1 située au Canada gagne certains types de revenus et paie de l'impôt sur ceux-ci (davantage de renseignements sont fournis dans le présent article). Seule une société privée sous contrôle canadien (SPCC) peut créer un compte d'IMRTD à partir de son «revenu de placement total»2 et de l'impôt payé sur les dividendes applicables reçus. Les autres types de sociétés privées peuvent uniquement créer un compte d'IMRTD à partir de l'impôt payé sur les dividendes applicables reçus. Les sociétés publiques et les sociétés non résidentes ne peuvent pas créer un compte d'IMRTD.

L'article 129 de la Loi de l'impôt sur le revenu (LIR) donne une définition détaillée et complexe de l'IMRTD. En bref, l'impôt remboursable est affecté au compte d'IMRTD d'une société de la façon suivante :

  1. 30,67 % du revenu de placement3 d'une société4, parfois appelé la «fraction remboursable de l'impôt de la partie I»
    ou
  2. 38,33 % des dividendes imposables versés à une société5 par des sociétés canadiennes «non rattachées»6 (impôt de la partie IV). L'impôt de la partie IV est également payable dans la mesure où les dividendes versés par une société rattachée donnent lieu à un remboursement au titre de dividendes pour la société payeuse.

Le revenu de placement se compose des gains en capital imposables7, moins les pertes au titre des placements d'entreprise, plus le revenu réalisé sur des biens, notamment l'intérêt, un loyer ou des redevances8. La société paie un taux d'imposition élevé sur ce type de revenu, environ 50 % (taux marginal combinant l'impôt fédéral et l'impôt provincial). Ce taux varie selon la province où la société exploite son entreprise.

Les dividendes de sociétés «non rattachées» (aussi appelés «dividendes de portefeuille») - sont les dividendes qu'une société touche sur des actions de sociétés qu'elle possède à titre de placement. Une société «rattachée» est une société :

  • sur laquelle une autre société exerce un contrôle9 ou
  • qui détient une participation de plus de 10 % dans une autre société10.

Le versement de dividendes en franchise d'impôt entre sociétés rattachées est possible, mais il faut consulter un conseiller fiscal pour déterminer si un dividende quelconque reçu d'une société rattachée est véritablement libre d'impôt. Les dividendes qu'une société reçoit de sociétés non rattachées sont assujettis à un taux d'imposition marginal combiné fédéral/provincial, après majoration des dividendes et application du crédit d'impôt pour dividendes fédéral et provincial. Un montant égal à l'impôt que la société qui touche le dividende paie sur ce dividende peut être porté au compte d'IMRTD de cette société.

1Le terme «société assujettie» est défini au paragraphe 186(3) de la Loi de l'impôt sur le revenu. En bref, il s'agit d'une société (autre qu'une société privée) située Canada et qui est contrôlée par un particulier autre qu'une fiducie ou par un groupe de particuliers autres que des fiducies, ou pour le compte d'un tel particulier ou groupe. En vertu du paragraphe 186(5), une société assujettie est considérée comme une société privée aux fins du remboursement au titre de dividendes, nous utiliserons simplement les termes «sociétés privées» et «SPCC» dans cet article.

2À des fins de simplicité, nous utiliserons le terme «revenu de placement» dans le présent article plutôt que «revenu de placement total». Ce dernier est composé des gains en capital nets et du revenu net provenant de biens (vous trouverez une définition plus détaillée ci-dessous). La définition officielle de ce terme figure au paragraphe 129(4) de la Loi de l'impôt sur le revenu.

3S'applique uniquement au compte d'IMRTD d'une SPCC.

4Pour les années d'imposition terminées avant 2016, le taux d'imposition était de 26,67 %. [Le montant correspondant à 30,67 % est composé d'un taux d'imposition de base de 20 % et d'un «impôt remboursable additionnel» de 10,67 %.]

5S'applique au compte d'IMRTD d'une société privée, qu'il s'agisse d'une SPCC ou non.

6Ce montant, prélevé sur les dividendes de portefeuille, correspondait à 33,33 % pour les dividendes reçus avant 2016.

7Le gain en capital imposable est le produit de la vente d'un actif immobilisé, moins le montant payé pour cet actif, moins les frais engagés pour le vendre, divisé par deux. La perte en capital est calculée de façon similaire et elle peut servir à réduire les gains en capital imposables.

8Le revenu provenant de placements étrangers, net du crédit pour impôt étranger, est également inclus.

9Par exemple, si la société qui verse des dividendes exerce un contrôle sur la société bénéficiaire, en vertu de la définition du «contrôle» énoncée au paragraphe 186(2).

10Par exemple, si la société qui reçoit des dividendes détient plus de (i) 10 % des actions avec droits de vote de la société payeuse et (ii) 10 % de la juste valeur marchande des actions émises par celle-ci.

Une société crée un compte d'IMRTD pour suivre l'impôt «supplémentaire» qu'elle paie sur son revenu de placement afin de préserver son droit de demander un crédit d'impôt lorsqu'elle verse un dividende imposable à un actionnaire. Pourquoi la société se donne-t-elle toute cette peine et pourquoi obtient-elle un crédit d'impôt? Tout se résume en un mot : intégration. L'intégration est un objectif important du système fiscal canadien. Lorsqu'un système fiscal est parfaitement intégré, les autorités fiscales ne se préoccupent pas de ce qu'un actionnaire touche un revenu à titre de particulier ou à titre de dividende de sa société. Elles percevront le même montant d'impôt en imposant le revenu de la société (puis en imposant les dividendes que l'actionnaire reçoit de la société) que si l'actionnaire avait touché le revenu à titre de particulier. Un deuxième objectif est de dissuader les investisseurs d'avoir recours aux sociétés comme abri fiscal pour le revenu de placement. Le système fiscal canadien permet d'atteindre cet objectif en exigeant un taux d'impôt élevé sur le revenu de placement des sociétés. S'il en était autrement, les investisseurs pourraient transférer des fonds à des sociétés, bénéficier du taux d'impôt généralement peu élevé accordé aux petites entreprises et reporter ainsi l'impôt sur leur revenu de placement. Par contre, le taux élevé d'impôt que l'on exige sur le revenu de placement des sociétés nuit à l'intégration lorsqu'une société distribue son revenu de placement après impôt à ses actionnaires. Voici ce qui arrive lorsqu'une société distribue son revenu de placement après impôt à ses actionnaires. Un revenu de 10 000 $ imposé à titre de revenu de la société au taux de 50 % laisse à la société 5 000 $ à distribuer à l'actionnaire sous forme de dividende. Si ce dividende de 5 000 $ est imposé à un taux de 35 % entre les mains de l'actionnaire (après majoration et crédit d'impôt pour dividendes), l'actionnaire se retrouve avec 3 250 $ après impôt. Cela équivaut à un taux d'impôt combiné de 67,5 % sur le montant initial de 10 000 $. Le recours à l'IMRTD permet à la société de bénéficier d'un crédit d'impôt qui vient réduire le taux d'impôt global.

Comme nous l'avons mentionné plus haut, lorsqu'une société touche un revenu de placement, elle peut porter un montant égal à 30,67 % de ce revenu au compte d'IMRTD. De plus, si une société touche un dividende d'une société canadienne non rattachée et qu'elle paie un impôt sur ce dividende, elle peut porter à son compte d'IMRTD un montant égal à l'impôt payé sur ce dividende. Si la société ne verse pas de dividende imposable à ses actionnaires, le compte d'IMRTD s'accroît chaque année où la société touche un revenu de placement ou des dividendes de sociétés non rattachées et qu'elle paie de l'impôt sur ce revenu. Le compte d'IMRTD confère un avantage à la société uniquement si elle verse un dividende imposable. Si la société verse un dividende imposable à ses actionnaires, elle peut demander un crédit d'impôt de 0,38 $ par tranche de 1 $ de dividende versé11, à concurrence du montant au compte d'IMRTD. Il n'est pas nécessaire que le dividende provienne des revenus du placement de la société. Pourvu que le dividende soit imposable entre les mains de l'actionnaire, la société peut demander le crédit d'IMRTD12.

Le tableau qui se trouve à la fin de cet article donne une idée du traitement fiscal applicable dans les situations suivantes (les taux d'impôt utilisés sont approximatifs) et aide à montrer comment fonctionne le crédit d'IMRTD :

  • Revenu d'un particulier tiré d'un salaire.
  • Revenu d'entreprise pour une société qui peut se prévaloir du taux d'imposition des petites entreprises.
  • Revenu d'entreprise et revenu de placement pour une société qui peut se prévaloir du taux d'imposition réservé aux petites entreprises et qui utilise le crédit d'IMRTD.

Même si chacun des scénarios présente des types de revenus variés assujettis à des taux d'impôt différents, l'intégration est presque parfaite et en bout de compte chaque scénario donne un revenu après impôt et un taux d'imposition global similaires. Dans la colonne à l'extrême droite, le revenu de placement de l'entreprise est imposé à des taux élevés et le dividende est imposé au même taux que les dividendes versés par les entreprises qui produisent uniquement des revenus d'exploitation de petite entreprise. Toutefois, le crédit d'IMRTD permet à la société de récupérer une partie de l'impôt élevé versé sur les revenus de placement de la société ce qui fait que le taux d'imposition global est près du taux d'imposition d'un particulier et d'une petite entreprise.

Naturellement, dans ce tableau on utilise des revenus et des taux d'imposition choisis pour les besoins de l'exemple. Si on modifiait les données dans les trois scénarios, on obtiendrait des résultats différents qui produiraient une intégration fiscale supérieure ou inférieure. L'objectif de l'intégration fiscale n'est pas d'obtenir des taux d'imposition parfaitement égaux dans tous les scénarios, mais plutôt de réduire la disparité qui se produit lorsque des taux d'impôt différents s'appliquent à différents types de revenu.

Les lignes inférieures du tableau montrent ce qui arriverait si le crédit d'IMRTD disparaissait. Le revenu total après impôt dans le cas du scénario qui inclut un revenu de placement d'une société (colonne à l'extrême droite) passerait de 113 968 $ à 95 778 $ et le taux d'imposition global passerait de 43 % à 52 %. Ce changement n'aurait aucune influence dans les deux autres scénarios. Le taux d'impôt élevé exigé sur les revenus de placement de sociétés dissuade donc les investisseurs d'utiliser leurs sociétés comme abri fiscal. Pour les sociétés qui touchent un revenu de placement, le crédit d'IMRTD ramène l'impôt total payable à un niveau comparable à celui que paient les sociétés et les particuliers qui touchent un revenu d'entreprise ou un revenu personnel, mais uniquement lorsque ces sociétés versent un dividende imposable.

11Avant l'adoption du projet de loi C-2 en décembre 2016, les SPCC avaient droit à un crédit de 0,33 $ par tranche de 1 $ de dividendes imposables versés («taux de 1 pour 3»).

12Veuillez noter que le versement de dividendes non imposables (i) entre des sociétés rattachées ou (ii) à partir du compte de dividendes en capital (CDC) d'une SPCC ne donnera donc pas lieu à un crédit d'IMRTD.

Pour les années d'imposition commençant après 201813, les sociétés privées disposeront de deux comptes d'IMRTD distincts :

  1. Un compte d'impôt en main remboursable au titre de dividendes non déterminés (IMRDND) composé (i) des soldes d'IMRTD des années d'imposition commençant avant 2019, (ii) de la fraction remboursable de l'impôt de la partie I payé sur les revenus de placement autres que les dividendes et (iii) de l'impôt de la partie IV payé sur les dividendes de portefeuille non déterminés.
    et
  2. Un compte d'impôt en main remboursable au titre de dividendes déterminés (IMRDD) composé, pour les années d'imposition commençant après 2019, (i) de l'impôt de la partie IV payé sur les dividendes de portefeuille déterminés (de sociétés non rattachées) et (ii) de l'impôt de la partie IV payé sur les dividendes déterminés et non déterminés versés par des sociétés rattachées ayant elles-mêmes reçu un remboursement au titre de dividendes.

Un crédit d'IMRTD (remboursement au titre de dividendes) est ensuite généré. À partir du compte d'IMRDND, un remboursement au titre de dividendes s'applique uniquement si la société verse un dividende non déterminé. Dans le cas du compte d'IMRDD, il s'applique si (i) la SPCC verse un dividende déterminé ou si (ii) la SPCC verse un dividende non déterminé et qu'il n'y a aucun solde dans le compte d'IMRDND. Lorsqu'une société reçoit un dividende versé par une société rattachée, la nature du dividende correspondra aux comptes d'IMRTD de la société payeuse. Les sociétés qui souhaitent bénéficier d'un remboursement au titre de dividendes sont tenues de remplir une déclaration de revenus dans les trois ans suivant l'année d'imposition au cours de laquelle les dividendes ont été versés.

13Ces mesures ont d'abord été proposées dans le budget de 2018, puis ont été adoptées en juin 2018. Des mesures de transition permettent à un SPCC de réaffecter son solde d'IMRTD dans un nouveau compte d'IMRDD, jusqu'à concurrence du moindre des deux montants suivants : (i) le solde d'IMRTD au moment de l'entrée en vigueur des nouvelles règles ou (ii) 38,33 % du solde du compte de revenu à taux général (CRTG) de la SPCC. Le solde restant du compte d'IMRTD sera affecté au compte d'IMRDND de la SPCC.

Pour dissuader les actionnaires d'utiliser leurs sociétés comme abri fiscal, le système fiscal canadien impose le revenu de placement des sociétés à des taux d'impôt similaires à ceux que paierait un actionnaire. Il vise également à intégrer ce revenu de manière à éliminer la différence entre l'impôt payable sur le revenu gagné à l'intérieur de la société et celui qui est gagné à l'extérieur de la société. Le compte d'IMRTD est un outil important qui aide le système fiscal à atteindre ces deux objectifs. Cet article ne vise qu'à fournir des renseignements d'ordre général. La Sun Life du Canada, compagnie d'assurance-vie, ne fournit pas de conseils juridiques, comptables, ni fiscaux aux conseillers ni à leurs clients. Avant que votre client ne prenne une décision fondée sur les renseignements contenus dans cet article, ou avant de lui faire une recommandation quelconque, assurez-vous qu'il demande l'avis d'un professionnel qualifié qui étudiera sa situation en profondeur sur le plan juridique, comptable et fiscal. Les exemples ou aperçus utilisés dans cet article n'ont été inclus que pour bien illustrer les renseignements donnés, et ne doivent pas servir de référence, dans votre esprit ou celui du client, pour justifier une opération quelconque.

Impact du traitement fiscal de l'IMRTD
REVENU Revenu personnel Revenu d'entreprise - sans compte d'IMRTD Revenu de placement de société - compte d'IMRTD
Affaires   200 000 $ 100 000 $
Particulier 200 000 $    
Intérêt     33 000 $
Gains en capital     34 000 $
Dividendes de portefeuille (déterminés)     33 000 $1
Revenu total 200 000 $ 200 000 $ 200 000 $
       
IMPÔT      
15 % sur le revenu d'entreprise   30 000 $ 15 000 $
45 % sur le revenu d'un particulier 90 000 $    
50 % sur le revenu d'intérêt d'une société     16 500 $
50 % sur les gains en capital d'une société (taux d'inclusion de 50 %)     8 500 $
38 % sur le dividende     12 649 $
Impôt total 90 000 $ 30 000 $ 52 649 $
       
COMPTES D'IMRTD      
IMRDND – Sur le revenu de placement (30,67 %)     15 335 $2
IMRDD – Sur les dividendes (38,33 %)     12 649 $3
Total du compte d'IMRTD     27 984 $
       
DIVIDENDE VERSÉ   170 000 $ 147 351 $
Impôt de 35 % sur le dividende   59 500 $ 51 573 $4
       
Crédit d'IMRTD (1,15 $ par tranche de 3 $ de dividende versé à concurrence du montant au compte d'IMRTD)     27 984 $5
Crédit d'IMRTD versé comme dividende     27 984 $
Impôt de 35 % sur le dividende     9 794 $4
Crédit d'IMRTD sous forme de dividendes      
Revenu total après impôt 110 000 $ 110 500 $ 113 968 $
Taux d'impôt global 45% 45% 43%
Revenu après impôt sans l'IMRTD 110 000 $ 110 500 $ 95 778 $
Taux d'impôt global sans l'IMRTD 45% 45% 52%

1Ils sont considérés comme des dividendes déterminés versés par une société non rattachée.
2IMRDND : compte d'impôt en main remboursable au titre de dividendes non déterminés pour les années d'imposition commençant après 2018
3IMRDD : compte d'impôt en main remboursable au titre de dividendes déterminés pour les années d'imposition commençant après 2018
4Bien que les dividendes déterminés et non déterminés soient imposés entre les mains de l'actionnaire à différents taux marginaux, le taux d'imposition de 35 % est utilisé comme taux d'imposition composé.
5À partir du compte d'IMRDND, un remboursement au titre de dividendes s'applique uniquement si la société verse un dividende non déterminé. Dans le cas du compte d'IMRDD, il s'applique si (i) la SPCC verse un dividende déterminé ou si (ii) la SPCC verse un dividende non déterminé et qu'il n'y a aucun solde dans le compte d'IMRDND.