Dre Michaela Hynie étudie l’inclusion sociale chez les nouveaux immigrants et les personnes âgées. Elle est directrice intérimaire du Centre for Refugee Studies de la faculté de santé de l’Université York. Dans le cadre de son travail, elle explore les nombreux défis que rencontrent ces groupes vulnérables. Les problèmes liés à la santé mentale, au transport, à la langue et à la mobilité sont des obstacles à l’inclusion des personnes au sein d’un groupe social. Elle a d’ailleurs pu en constater les conséquences. 

« N’importe qui peut se sentir [isolé]. Mais certaines situations peuvent rendre certaines personnes encore plus vulnérables », affirme la Dre Hynie. « Une mauvaise connaissance du français ou de l’anglais, par exemple, peut favoriser l’isolement. Les personnes qui ont la responsabilité de prendre soin des membres de leur famille ont souvent moins la possibilité de sortir de chez elles. Il y a aussi les obstacles liés au transport. Si on n’a pas accès à une voiture ou au transport en commun, on ne peut pas sortir pour rencontrer des gens. »

La Dre Hynie a été encouragée par les résultats d’un programme de l’Association canadienne pour la santé mentale s’échelonnant sur plusieurs années. Cette série de projets intitulée « Minding our bodies » avait pour but de promouvoir une saine alimentation et une vie active pour améliorer la santé mentale.

« Il était bien sûr important de faire de l’exercice et d’apprendre à cuisiner, souligne la Dre Hynie, mais ce sont surtout les réseaux sociaux qui se sont développés grâce à ces activités qui ont été la clé de leur réussite. Ils ont aidé les gens à se sentir mieux. »

Les participants, dont la plupart souffrent d’une maladie mentale comme la dépression ou la schizophrénie, n’ont pas seulement cuisiné ou fait de l’exercice. Ils se sont fait des amis.

Les bienfaits des réseaux sociaux

Les relations sociales sont bonnes pour la santé. Elles aident à réduire le niveau d’anxiété et les symptômes de la dépression et à surmonter les situations difficiles.

Toutefois, ces bienfaits vont au-delà des avantages psychologiques. Selon le National Institute on Aging des États-Unis, « La solitude crée de la douleur émotionnelle. Si une personne perd son sentiment d’appartenance et de communauté, sa façon de voir le monde peut changer. La douleur émotionnelle peut activer dans le corps les mêmes réponses au stress qu’une douleur physique. Sur une période prolongée, cette situation pourrait entraîner de l’inflammation chronique et une immunité réduite. »

Les scientifiques croient maintenant que l’inflammation contribue à l’apparition de troubles comme la maladie d’Alzheimer et les maladies du cœur. En revanche, les interactions sociales sont associées à de plus faibles niveaux d’inflammation. Participer à des activités sociales contribue aussi à réduire la tension artérielle ainsi que les risques de maladie et de mortalité.

« Elles réduisent la tension artérielle, stimulent le système immunitaire et améliorent le sommeil », déclare la Dre Verena Menec. Dre Menec est professeure au département des sciences de la santé communautaire de l’Université du Manitoba.

Fait intéressant : les relations sociales n’ont pas toutes les mêmes effets positifs sur la santé. Une étude de 2010 publiée dans le Journal of Health and Social Behaviour (en anglais) a montré que la qualité des réseaux compte, et qu’elle influence nos comportements. 

« On pourrait penser qu’une personne en couple est plus heureuse et en santé », dit la Dre Menec. « Toutefois, si la relation avec le conjoint est mauvaise, les bienfaits sont moins nombreux. »

Selon elle, pour certaines personnes, le fait d’avoir une ou deux relations d’amitié solides – avec quelqu’un qui les réconforte et qui écoute leurs problèmes – c’est suffisant. Mais pour la plupart des gens, plus ils en ont, mieux c’est. Les relations avec la famille, les amis et les connaissances apportent diverses expériences sociales – soutien, rire, divertissement ou soins – et répondent aux divers besoins d’une personne.

« Chaque type de relation peut vous procurer des bienfaits uniques. »

Les études citées par le Brazilian Journal of Geriatrics and Gerontology (en anglais) sont également intéressantes. On y lit que les relations d’amitié ont davantage d’effets positifs que les relations avec la famille. Cela pourrait reposer sur le fait qu’on peut choisir nos amis, mais pas les membres de notre famille. Par ailleurs, le temps passé en famille est souvent consacré à des activités plus routinières, alors qu’on rencontre des amis pour s’amuser. 

Entretenir vos réseaux sociaux

Selon la Dre Menec, le pire qu’on puisse faire est de s’isoler et de perdre contact avec ses amis. Cette situation se produit quand on vieillit ou lorsqu’on est atteint d’une maladie chronique. 

De nombreux hommes hétérosexuels en couple ont tendance à n’avoir qu’un petit réseau, nous dit la Dre Menec. Certains n’ont personne d’autre que leur femme. Arrivés à un certain âge, et surtout s’ils sont veufs, les hommes se retrouvent avec peu d’amis. « Ils n’entretiennent pas autant leurs amitiés que les femmes », affirme la Dre Menec. « Si leur conjointe décède, ils sont perdus. Il est ensuite difficile d’entrer en contact avec eux. »

Selon la Dre Hynie, si les personnes âgées sont découragées à l’idée de se joindre à un groupe, les membres de leur famille peuvent les aider à surmonter les obstacles courants. Ils peuvent les encourager à participer à des activités, ou à chercher des cours abordables, des ateliers, des programmes d’exercice ou des clubs et les y conduire. Le transport est un obstacle? Il existe des services comme Wheel Trans. La Croix-Rouge ou la CARP (Canadian Association for Retired Persons) offrent aussi de l’aide.

Les programmes d’aide à la communauté soutiennent les nouveaux arrivants au Canada en les aidant à se bâtir un réseau. Ils favorisent la socialisation entre personnes ayant les mêmes intérêts et compétences. Ils offrent aussi des stratégies d’intégration, comme des cours de langue et de la formation. 

Se faire de nouveaux amis à la retraite

La retraite vient ajouter quelques défis à ce chapitre. En effet, on perd les interactions quotidiennes avec nos collègues, et c’est souvent ce qu’on appréciait le plus de notre travail. À 60 ou à 70 ans, vous pourriez commencer à perdre des amis en raison d’une maladie ou d’un décès. Et si changez de ville ou même de quartier, vous pourriez perdre votre réseau. 

On ne peut pas remplacer les vieux amis, mais on peut s’en faire de nouveaux. Cela peut sembler intimidant, surtout si vous avez le même cercle d’amis depuis des années, ou si vous êtes de nature réservée. Quoi qu’il en soit, c’est plus facile que vous ne le croyez. Voici quelques idées :

  • Parlez à vos voisins. Les gens sont souvent très gentils. Selon l’endroit où vous emménagez, il pourrait y avoir d’autres personnes à la retraite.
  • Jetez un coup d’œil à la bibliothèque locale et au centre pour personnes âgées. On y offre des activités gratuites ou à faible coût, comme des conférences, des ateliers d’art et d’artisanat ou des séances d’exercice.
  • Impliquez-vous dans un lieu de culte. Quelles que soient vos croyances, vous croiserez des personnes sympathiques et contentes de vous rencontrer. (Ce ne sont pas les occasions de bénévolat qui manquent dans une église, une mosquée, une synagogue, un temple ou un gurdwara.)

Selon la Dre Hynie, le bénévolat est une excellente activité pour rencontrer des gens et se sentir utile. « Il est prouvé que le bénévolat apporte de nombreux bienfaits », dit-elle. « C'est une activité qui permet d’entrer en contact avec d’autres personnes, ce qui rend les gens plus heureux. »

« Renforcer son réseau social est donc une des plus importantes choses à faire », ajoute-t-elle.

La Dre Menec acquiesce : « Cultivez vos amitiés. »

 

Cet article ne vise qu’à fournir des renseignements d’ordre général. Il ne prétend pas être un avis médical ni remplacer les conseils d’un professionnel de la santé.